En tant que cliente-patiente des professionnel.le.s de la santé et du développement personnel, j’ai souvent dû faire un effort pour être simplement entendue dans le respect de mes propres habitus.
En tant que praticienne, ce qui m’importe, c’est le rapport: entrer en connexion avec l’univers de l’autre, quelles que soient ses normes, des plus dissidentes aux plus traditionnelles, pour accueillir et accompagner.
Licorne?
Mon entourage est joyeusement peuplé d’êtres extra-ordinaires… qui existent pleinement, mais que les normes de la société dominante maintiennent dans l’obscurité médiatique ou dans la caricature grotesque (ce qui revient de toute façon à en masquer la réalité).
Les artistes expérimentaux, chercheur.euses au-delà des évidences et transformateur.trices de sociétés, en font évidemment partie. Certain.e.s s’identifient d’ailleurs comme « licornes ».
Mais j’évoque plus spécifiquement ici les êtres à paillettes, qui ne se situent pas nécessairement dans le champ des arts contemporains de recherche. Bref, ces ensembles ont des intersections communes mais leurs champs (licornes, fées… / art de recherche) ne correspondent pas complètement.
Etant inconnu.e.s, iels peuvent déclencher de fortes réactions d’incompréhension (je pense, par exemple, à un artiste expérimental auquel la famille réclame continuellement de « trouver un vrai métier » et à une copine queer que la famille ne lâche pas sur son look depuis des années: « tu pourrais au moins t’arranger un peu, te maquiller »…), de la curiosité (et de questionnement hyper-intime, sans respect de la pudeur), de la peur (de la contamination, entre autres), de l’agressivité même indirecte (« pédé », « putain » sont des insultes ordinaires), des discriminations (certain.e.s les accumulent… trans + peau foncée + formes très généreuses + polyamour + handicap + zèbre + travailleur.euse du sexe + pansexualité + performer…), de violence morale et physique, d’incompréhension agressive (« ben quoi, si t’es poly, un de plus ou de moins, hein, pourquoi pas moi?!), en plus de l’invisibilité ordinaire (ex: dire « les hommes » pour désigner les humains ou ne pas se rendre compte de la non-représentation de certaines catégories de personnes racisées dans une large audience) et de la négation de la personne (ex: mégenrer en utilisant un pronom (il/elle) en accord avec le sexe biologique et non en accord avec le genre)…
Ces licornes et autres êtres fantastiques évanescents qui ne rentrent pas dans les modèles des magazines-webzines, chaînes télés-radio et familles traditionnelles, se rassemblent souvent (pas toujours et pas seulement) dans des alter-groupes, par singularités et/ou activités fédératrices (quelques-uns en vrac: zèbres, bears, féministes queer, poly, sexe-positifs…), où chacun.e reconnait l’existence et le merveilleux de l’autre. Ces espaces « safe », de sécurité et de liberté (mais aussi de défense aux miradors bien gardés), sont « inclusifs » et font la chasse – parfois de façon extrême – aux -phobes de tout poil, selon des normes libertaires basées sur le respect et la tolérance de chacun.e, en réaction contre la violence des normes de la société dominante édictées par l’abominable-homme-cis-hétéronormé (dont l’un des stéréotypes pourrait être le « chef de famille » qui fait des blagues « pour rire hein! » sur les blondes, les tarlouzes et les putes, en allumant le barbecue à saucisses). Parfois, le protectionnisme donne lieu à de nouvelles restrictions de la liberté, à des « règles » paradoxales par rapport aux intentions de la communauté première… Et c’est reparti… Il y a de quoi réinventer sans cesse!
(Question invention… les Soeurs de la Perpétuelle Indulgence du Couvent de Paname se débrouille pas mal)
Se justifier?
En tant que cliente-patiente des professionnel.le.s de la santé et du développement personnel (du.de la gyné à l’hypno en passant par le.a psy, avec de nombreux intermédiaires), j’ai souvent dû faire un effort pour être simplement entendue et accompagnée dans le respect de mes propres habitus.
Au pire, ceux-ci étaient classés directement dans la case « symptôme ». Consulter pour un problème de sommeil et devoir batailler pour ne pas être « traitée » pour un « problème » qui n’en est pas un pour moi m’est arrivé pas mal de fois (certain.e.s osent carrément le: « vraiment? vous êtes sûre de ne pas vouloir vous dépêcher pour tomber enceinte là maintenant? après ce sera trop tard et vous le regretterez… je connais plusieurs femmes qui… » ou des réflexions sur les poils ou pire…).
Au mieux, la.e praticien.ne évite la projection et entre tranquillement dans mon univers sans utiliser ses propres filtres, pour entendre ma demande et non ses malaises personnels. Youpi merci!
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Entre les deux… il y a la maladresse du style « garçon, fille, il faut choisir » de l’énergéticien en questionnement sur mon ventre ou bien le – très-trop-long – temps de l’explication (comment payer une séance qui est en fait un cours donné à l’opérateur.trice sur une « question qui l’intéresse », comme la fluidité du genre ou les polyrelations, et qui l’entraîne, malgré mes efforts pour recentrer le propos, dans un état de fascination qui l’éloigne de sa fonction d’accompagnant.e), ou le malaise de l’incompréhension (car pas de cases à cocher), ou l’interprétation psychanalytique de comptoir, ou le rappel vers ce qui l’interpelle personnellement (moi pas), alors que je paie pour avancer sur une intention claire… ou l’énervement du bon, là, Marie, tu le fais exprès hein?! en recevant une réponse différente de celle qui semblait a priori évidente (je me souviens notamment d’un exercice entre collègues où mon opératrice était soulagée de trouver une certitude imparable pour son exercice: Tu es une femme, ça c’est certain! et a été gentiment exaspérée par mon euh… ben non, c’est pas si clair en fait).
Bref…
Et ce n’est pas prêt de se terminer, vu la façon dont certaines formations en sexo ou psychopatho sont orientées.
Voilà pourquoi la question m’intéresse!
Ce qui m’importe, c’est le rapport: entrer en connexion avec l’univers de l’autre, quelles que soient ses normes, des plus alternatives aux plus traditionnelles, pour accueillir et accompagner.
En résumé, en écoutant ce que vous avez à dire ou à taire, je n’ouvrirai pas de grands yeux fascinés, je ne froncerai pas les sourcils, je ne plisserai pas le nez, je ne chercherai pas à vous ramener à la m.raison…
Car il s’agit – ayant désactivé mes propres filtres -, d’entrer en contact profond, de voir et d’être vue, pour vous accompagner simplement vers la création de votre vie, votre oeuvre, votre monde.
« A côtoyer des licornes et des artistes expérimentaux, es-tu toujours capable de t’adapter à l’univers d’une personne plus traditionnelle? »
…me demande-t-on de temps en temps.
Je répondrai que je ne vis pas dans une secte, mais bien en immersion dans différents univers, reliés ou non. Membres de ma famille belge, amis d’enfance, collègues hypnos, collègues artistes, entourage de divers cercles et horizons géographiques… forment un monde où la diversité des habitus est une richesse.
En outre, en tant qu’accompagnatrice, je privilégie la connexion (rapport, complicité, fluidité, adhésion, immersion…) et non la compréhension au sens rationnel, intellectuel du terme.
C’est un peu comme ce que je pratique avec les chats, chevaux, oiseaux… en me connectant avec mes ressources les plus profondes, je « suis », en immersion, les ressentis et réactions des êtres que je rencontre, sans interroger mon système d’organisation du monde pour voir si ces ressentis et réactions correspondent aux miens et à quelles conditions. Juste dans l’ici et maintenant.
Et j’ai du plaisir à le faire, quel que soit l’univers des êtres qui me font confiance, car chaque fonctionnement recèle des paysages singuliers et des lumières inouïes.
Friendly *
* Licorne friendly * Polyamory friendly * Zèbre friendly * Nullipare friendly * Fat friendly * LGBTQIA+ friendly * Handi friendly * Grand-m.père friendly * TDS friendly * Indépendant.e-ouvrier.e-employé.e-chomeur.euse-cadre-astronaute-dentiste-ministre-infirmier.e-gardien.ne-analyste-botaniste-enseignant.e-contrôleur.euse-artiste-journaliste…friendly * Chamane friendly * Cis friendly * Homoparentalité friendly * Personne racisée friendly * Pluripartenariat friendly * Queer friendly * Sorcier.ère friendly * Créateur friendly * CrossFit friendly * Hétéronormé friendly * Loutre friendly * Sexworker friendly * Séropo friendly * Kinky friendly * Vegan friendly * Freak friendly * Pervers positif friendly * Pan friendly * Fetish friendly * Contrôleur.euse friendly * Amazone friendly * Fée friendly * Hypno friendly * Ornithorynque venimeux friendly * Sexpositif friendly * Nonne friendly * Intellectuel.le friendly * Cousin.e friendly * Ecosophe friendly * Nymphe friendly * Cycliste friendly * Libertaire friendly * Butch friendly * Nice guy friendly * Puma friendly * Trans* friendly * Chèvre friendly * Chacun.e avec ce que/qui vous êtes friendly *
En séance, ce que je suis, mes valeurs, mes représentations n’ont pas lieu d’être. Il m’est possible de trouver la beauté chez toute personne que j’accompagne, qu’elle soit colibri ou dealeuse de chasse au lion.
En revanche, comme je l’ai détaillé dans les infos, je choisis de ne pas accompagner en séance les personnes:
- diagnostiquées comme atteintes d’un trouble psychotique (schizophrénie, paranoïa, maniaco-dépression…)
- diagnostiquées comme atteintes d’un trouble bipolaire ou comme atteintes d’anorexie
- sous anxiolytique ou antidépresseur au quotidien
- atteintes d’alcoolisme sévère ou prenant des drogues au quotidien (je ne parle pas de marijuana)
- mineures ou sous tutelle
… car cela demande une spécialisation, voire un double titre médecin-hypno, pour voyager en toute sécurité. Je vous transmettrai, si c’est votre cas, les coordonnées d’un.e collègue spécialisé.e.
Sourire.
© Marie Lisel
Image: Unicorns | Steven Baker via Flickr