Lygia Clark définissait l’artiste « comme un propositeur de conditions qui permettent au récepteur de se laisser embarquer dans le démontage des formes – y compris les siennes propres – en faveur de nouvelles compositions de flux ».
L’hypnotiste pourrait également être défini en ces termes, n’est-ce pas? Comme la pratique artistique, la pratique de l’hypnose et d’autres expérimentations sensorielles donnent des accès éclairés à soi et au monde.
Y voir plus clair, créer des ouvertures, atteindre un pan de clairvoyance, une épiphanie, un éveil, une compréhension profonde, un déclic… engage à ajuster précisément sa position propre, à laisser de la place pour l’inédit, à libérer son existence mais aussi sa créativité, son écriture, son mouvement, son souffle, sa voix, son trait… en dépassant les habitudes et les anciennes croyances limitantes.
Pour moi, l’une des façons primordiales d’atteindre la connaissance vient de la simple expérience spontanée d’une situation décalée par rapport à mes situations de conditionnement, ce que l’on peut appeler « recadrage, surprise, décalage, saisissement, déroute ». Si j’accueille cette expérience, dans l’ici et maintenant, en étant simplement là, si je garde le focus sur ce qui se passe pour ne pas me laisser distraire ni embrumer par des éléments de circonstance, si je pose une intention sans rien forcer, sans préciser mes attentes ni présumer d’un résultat, si je prends de la distance en hauteur sans rester calée dans une position de recul conceptuel mais bien en plongeant dans l’expérience… alors j’accède à des pans qui m’étaient jusque-là inaccessibles et j’agrandis le champ de ma liberté. Et plus j’expérimente de situations hors pistes en posant des intentions sans anticiper ce qui est par définition inaccessible avant l’expérience ouvrante, plus j’ajoute des couleurs à ma palette, des degrés à mon élargissement, des possibilités de positionnement, des outils de gestion de troubles intenses, de décalages puissants, jusqu’à inverser le refus-réflexe et transcender l’inquiétude et même l’effroi avec confiance, en toute sécurité, pour en ressortir plus juste et mieux ancrée, moins entravée, plus disponible à soi, à l’invention, à la création, à la relation, à l’autre, au monde.
D’une autre façon, mon travail de création sonore offre, à sa modeste mesure, des expériences transformatrices à l’auditeur, dans le sens où il permet l’émergence d’une autre représentation (dans le cas du documentaire de création Merci Madame), d’un état modifié de conscience qui ouvre à un rêve dirigé par l’hypnose dans lequel les sensations étranges se succèdent (dans le cas de bOa) ou encore de la participation spontanée à un puzzle fantasmagorique collectif (dans Fantasmes)…
Je propose également des séances d’hypnose éricksonnienne individuelles oeuvrant dans cette direction (voir les articles traitant de ce sujet).
Et aussi des workshops (groupes de 4 à 30 personnes), mêlant hypnose, intuition, connexion, exploration sensorielle (notamment la synesthésie ou le questionnement queer) et création artistique, autant en école d’art qu’en académie de développement personnel.
Mes recherches théoriques et pratiques sur les états modifiés de conscience, sur les effets des sons, sur les passages d’un sens à un autre, sur l’intuition, sur la connexion… rejoignent ce désir d’ouverture, de dépassement des réflexes et habitudes, par l’appréhension de processus divers et variés.
Vous pouvez avoir un aperçu de mon laboratoire dans des articles ou à travers la création sonore de Franck Thoraval, à laquelle j’ai participé: ici
Ce travail de déconditionnement et d’exploration est pour moi relié à la nature, aux sens (il y en a bien plus que 5 !) et notamment à notre perception des ondes sonores, aux arts et, enfin, aux pratiques singulières, notamment en matière de genres et de sensorialité ou sensualités. Je désire dès lors développer un travail dans la nature (collaboration: architecte paysagiste? gestionnaire de forêt? botaniste? ), un travail dans les lieux d’art contemporain (collaboration: avec des artistes mais aussi avec des écoles d’art, des galeries), un travail dans les micromondes où s’expérimentent d’autres façons d’être avec son corps, son intuition, ses canaux de communications.
Entre mon labo privé, les séances d’exploration individuelles, les workshops en groupe, les écoutes en ligne, les collaborations avec des créateurs… je cherche à développer et à partager les richesses de ces pratiques et à jouer avec ma position aux croisées de différents champs: l’hypnose éricksonienne, l’art contemporain, la création sonore acousmatique, l’exploration sensorielle, les études sur le genre…
© Marie Lisel
Image: Claude Cahun /